En Palestine, la tradition veut que ce soit le père de la mariée qui aille remettre les faire-part en mains propres à ses invités. Une coutume baptisée Wajib qu’accomplit un professeur de Nazareth divorcé, en compagnie de son fils revenu de Rome pour l’occasion. Au fil de ce périple et de ces brèves rencontres va affleurer tout ce qui les sépare. Une aubaine scénaristique qui permet à Annemarie JACIR d’esquisser un tableau de mœurs très juste d’une communauté filmée habituellement en pleine tragédie. Autre bonne idée : celle d’en confier les deux rôles principaux à des acteurs qui sont vraiment père et fils. À travers leurs différends, s’expriment au-delà de l’éternel conflit des générations des choix existentiels radicalement opposés. Là où l’aîné est attaché à sa terre, son fils appartient à une diaspora qui a compris que son salut collectif était indissociable de sa réussite individuelle. Elle-même tiraillée par ce cas de conscience, bien que née à Bethléem, la réalisatrice a fourbi ses armes aux États-Unis et s’est déjà fait remarquer il y a quelques années avec un film intitulé Le Sel de la mer (2008) qui questionnait ses racines sur un ton nettement plus polémique. Wajib, la demande en mariage emprunte délibérément la voie du film de genre afin d’élargir son auditoire et d’évoquer le sort des Palestiniens d’un point de vue purement humain, en les montrant confrontés au quotidien à des problèmes universels qui concernent tous les pères et tous les fils d’où qu’ils soient.
Critique de Jean-Philippe GUERAND
Wajib. Film palestinien de Annemarie JACIR (2017), avec Mohammed BAKRI, Saleh BAKRI, Maria ZREIK. 1h36
Photos :
Copyright 2017 Pyramide Distribution