Orlando, le roman que Virginia WOOLF publia en 1928, se déroule sur quatre siècles. Son personnage principal vogue entre les temps, entre les sexes. Le roman naquit de la relation de l’écrivaine avec Vita SACKVILLE-WEST, le personnage s’inspire d’elle, le livre lui est dédié. Aristocrate brillante, richissime, mondaine, écrivaine elle-même, Vita était fascinée par Virginia, tourmentée, géniale, plus discrète, et fit patiemment sa conquête. L’aisance et la légèreté rendant hommage humblement au génie et à l’inquiétude créatrice, l’amour qui s’installe, la sensualité qui s’approche de Virginia, le sujet est enthousiasmant. La beauté triomphante de Gemma ARTERTON, ses vêtements et ses manières sublimes, son rayonnement ; les angoisses et la puissance démiurgique suggérées par Elizabeth DEBICKI intéressent constamment. La cinéaste de 33 ans, dont c’est le deuxième film, organise son travail avec beaucoup de soin, dirige des actrices d’exception (la mère de Vita est une impressionnante Isabella ROSSELLINI). Mais, comme souvent dans les films biographiques, on souhaiterait plus de folie, moins de retenue. Une fois le contrôle établi sur le sujet, l’art devrait bouleverser les formes. Le spectateur est intéressé, attentif, a envie de poursuivre son enquête en sortant de la salle. Mais il lui manque ce que cette jeune cinéaste offrira peut-être dans son prochain film.
Critique de René MARX
Vita and Virginia. Film britannique de Chanya BUTTON, avec Gemma ARTERTON, Elizabeth DEBICKI, Isabella ROSSELLINI. 1h50