19 février 2019

Les Moissonneurs d’Etienne KALLOS

Si le cinéma est une affaire de point de vue, position respectable, alors Les Moissonneurs, premier long métrage d’Etienne KALLOS, a le mérite d’en présenter un peu conté ou représenté : celui des afrikaners d’Afrique du Sud, le peuple des blancs ayant très littéralement dominé le pays jusqu’à la fin de la ségrégation et l’avènement de la nation arc en ciel de MANDELA. Une espèce de nation dans la nation brisée (justement) par les faits et l’histoire. C’est dans ce terreau complexe et donc riche que se pose la caméra de KALLOS, pour une sorte de fable noire, où l’adoption prend les formes d’un eugénisme improvisé, aidant à la constitution d’un clan renfermé sur soi. Un clan qui se voit assiégé de toutes parts, et agit comme tel. Cet assaut du monde, qui n’est que l’assaut du réel, est un beau sujet de cinéma. Il permet une peinture à la fois sauvage et faussement idyllique, dans le rythme ou les cadres. Une esthétique des champs, de la vie au grand air, aux accents élégiaques, à la beauté intemporelle (pouvant vaguement rappeler certaines scènes des films de Terrence MALICK) qui forment un contrepoids tranchant avec la sauvagerie, la violence rentrée mais impitoyable des personnages. Une dureté liée au fanatisme, qui dépasse, voire réduit en cendres, tous les liens d’amitié, d’amour ou familiaux. Les Moissonneurs présente avec une virtuosité glaçante la violence politique et idéologique à l’œuvre, sous le glacis de la tradition et d’une beauté froide, finalement tout aussi inquiétante.

Critique de Pierre-Simon GUTMAN

Film sud-africain d’Etienne KALLOS (2018) avec Brent VERMEULEN, Alex VAN DYK, Juliana VENTER. 1h46.


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