D’abord une précision importante, ce COGITORE-là est le frère de Clément, le réalisateur de Ni le ciel ni la terre (2015). Romain s’est fait remarquer quant à lui avec Nos résistances (2011). Il s’attache dans son deuxième long métrage à la rencontre de deux Français exilés à Taïwan qui vivent une sorte d’amour idéal dans un environnement résolument polyglotte. Jusqu’au moment où le destin vient contrecarrer leurs plans d’avenir. Ce film au romantisme assumé joue sur le contraste qu’il établit entre une intrigue moins classique qu’il ne pourrait y paraître et l’exotisme de son cadre. Il repose également sur l’opposition entre ses deux interprètes principaux : Déborah FRANÇOIS dont on a du mal à comprendre qu’elle n’occupe pas une position plus en vue au sein de sa génération, tant elle se révèle impeccable dans ses choix comme dans ses interprétations, et Paul HAMY, qui doit défendre ici un personnage complexe en occupant en quelque sorte “la place du mort”. Malgré un sérieux problème de rythme, cette romance singulière s’appuie sur une atmosphère étrange à la lisière du fantastique, autour de la lutte éternelle d’Eros et Thanatos qui a engendré tant de belles variations par le passé. Le film joue habilement de sa déconstruction pour donner l’illusion au spectateur de contempler les morceaux brisés d’un miroir dans lesquels se reflèteraient des instants de vie épars. L’exercice est aussi audacieux que le résultat est inégal. Il convient toutefois de saluer son ambition atypique.
Critique de Jean-Philippe Guerand
Film franco-taïwanais de Romain COGITORE (2018), avec Déborah FRANÇOIS, Paul HAMY, Daniel MARTIN. 1h37.