11 juillet 2018

La Ballade de NARAYAMA de Shohei IMAMURA

On a un peu oublié Shohei IMAMURA, qui à partir des années 60 a pourtant (avec Nagisa OSHIMA) quelque peu révolutionné le cinéma japonais, jusque-là dominé par un trio de génie (Akira KUROSAWA, Kenji MIZOGUCHI, Yasujiro OZU).

La ressortie de La Ballade de Narayama survient donc à point pour rappeler que notre homme fait partie du club restreint des cinéastes doublement palmés à Cannes (pour La Ballade de Narayama, puis pour L’Anguille). Et qu’il est signataire d’une œuvre cohérente, dérangeante, provocatrice, sensuelle, contestatrice, baroque et que cette Ballade de Narayama en est l’une des plus belles illustrations. Si IMAMURA n’a eu de cesse de dénoncer les dérives matérialistes du Japon moderne, il change quelque peu de cap avec ce film dont l’action se déroule vers 1860 dans un petit village retiré du monde. Nous nous attachons à une vieille femme qui va bientôt atteindre 70 ans. L’âge limite auquel la tradition commande de prendre congé pour aller mourir sur les hauteurs de la montagne. Et notre héroïne de mettre un peu d’ordre dans les affaires de sa famille avant de la quitter…

Au-delà du personnage, c’est toute la vie du village qui est scrutée avec une attention d’entomologiste. IMAMURA nous montre d’ailleurs suffisamment de rites animaux pour suggérer que l’espèce humaine ne diffère pas fondamentalement et que ses codes en valent sans doute d’autres. Une façon de voir qui a fait (et fera) grincer bien des dents mais dont la radicalité n’est pas exempte de séduction. Dérangeant, le film n’en possède pas moins une force lyrique, une humanité (décalée) et d’évidentes qualités formelles peu communes. Hautement recommandable.

Critique de Yves ALION

Narayama Bushikou. Film japonais de Shohei IMAMURA (1983), avec Sumiko SAKAMOTO, Ken OGATA, Takejo AKI. 2h13.

Photos : © La Rabbia


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