Si Grand Froid est le premier long métrage de Gérard PAUTONNIER, ce dernier ne nous est pourtant pas inconnu. Adapté d’un roman de Joël EGLOFF, son court métrage précédent, L’Étourdissement avait en effet fait le tour des festivals, glanant moultes récompenses au passage. Grand Froid est issu de la prose du même EGLOFF et nous invite lui aussi à nous plonger dans un univers foutraque, brassant insolite, métaphysique et humour noir. Et Arthur DUPONT, qui nous avait scotché en employé des abattoirs sentimental, est ici un jeune croque-mort pas très à l’aise dans ses pompes (funèbres). Il chemine pour la circonstance avec un Jean-Pierre BACRI au sommet de son art, distribuant force aphorismes au fur et à mesure que le (dernier) voyage du macchabée qu’ils convoient prend une tournure des plus inattendues. Ce serait sans doute mentir que de dire que le film est trépidant, le grand froid du titre ayant sans doute un peu engourdi les personnages, mais cela ne nous empêche pas d’applaudir ce très bel exercice de style. PAUTONNIER a évidemment cherché à imprimer une atmosphère, à brosser un décor particulier qui se mue peu à peu en univers esthétique personnel. Même si le ton pince-sans-rire du film et la neige aidant nous font loucher de temps en temps du côté des frères COEN. Mais l’ensemble est universel et il est clair que les auteurs ont veillé à ce que l’on ne reconnaisse aucun territoire trop marqué. Les villes fleurent bon nos provinces quand les campagnes enneigées ont été trouvées… en Pologne. Un éloignement que les comédiens ont sans doute ressenti et qui ne les a pas desservi au moment d’incarner ces croque-morts à la dérive…
Critique d’Yves ALION
Film français de Gérard PAUTONNIER (2017), avec Jean-Pierre BACRI, Arthur DUPONT, Olivier GOURMET. 1h 26.