Le titre ne laisse planer aucun doute : tout comme Pablo BERGER l’avait fait il y a sept ans avec son ébouriffant Blanca niveves, Anne FONTAINE nous propose bel et bien de revisiter le mythe de Blanche-Neige. Avec des comédiens, cela va sans dire, dans un contexte contemporain, histoire de doubler le plaisir, puisqu’il faut imaginer à chaque scène le moyen de trouver une correspondance dans l’air du temps. L’intérêt du conte des frères GRIMM est qu’il peut très facilement tirer dans plusieurs directions. La comédie romantique, puisque le Prince charmant est au bout du chemin. Le thriller horrifique, puisque la méchante reine n’a de cesse de faire assassiner la jeune fille. Anne FONTAINE, a voulu nous offrir quant à elle un film féministe, qui prône sans rechigner l’émancipation sentimentale et sexuelle des jeunes filles en fleur (ce que les Sept nains ont bien remarqué), qu’elles soient ou non perdues dans la forêt. Le film baigne d’ailleurs dans une atmosphère dont l’étrangeté se mâtine volontiers d’érotisme, ce qui n’est pas pour nous chagriner. Bien sûr, il est des moments où le mécanisme grince un peu, quand le scénario semble un peu tiré par les cheveux et que le pittoresque patine, mais ces passages à vide ne sont que vétilles : le plaisir est grand de se retrouver aux prises avec un film qui sort résolument de l’ordinaire. Le résultat n’est sans doute pas à la hauteur des Innocentes, à tous égards le chef d’œuvre de la cinéaste, mais nous ne pouvons que la créditer de construire une œuvre protéiforme, qui visite tous les genres et se remet sans cesse en question. Blanche comme neige est ludique, subtil. Il nous donne envie de revoir La Compagnie des loups, de Neil JORDAN, qui il y a 35 ans revisitait le mythe du Petit Chaperon rouge dans un état d’esprit assez similaire…
Critique de Yves ALION
Film français d’Anne FONTAINE (2019), avec Lou DE LAAGE, Isabelle HUPPERT, Benoît POELVOORDE. 1h52.