Il faut bien le dire, on avait complètement perdu de vue Adolfo « Ado » Arrietta, dont le dernier long métrage sorti en salles (Flammes) date de… 1978 ! Cinéaste marginal, à la limite de l’underground, il s’était signalé dans les années soixante-dix par des films libres et étranges en forme de contes pervers, et a poursuivi depuis son œuvre par des courts et des moyens métrages confidentiels. Avec ce film, il revient à son obsession de mettre en images des contes dans lesquels les protagonistes eux-mêmes vont jusqu’au bout d’un fantasme, d’un désir fétichiste. Dans cette adaptation personnelle mais assez fidèle de La Belle au bois dormant, un jeune prince est littéralement obsédé par la légende et désobéit à son père pour découvrir le royaume endormi de la Belle. L’aspect fascinant du film d’Arrietta est que, tout en modernisant le récit avec force clins d’œil, il reste absolument fidèle à l’esprit même du conte. Chez lui, les fées existent, la magie également. Il en résulte un film qui, en dépit du manque de moyens ou peut-être grâce à lui et à la modestie qui en résulte, se révèle d’une invention permanente, ainsi que d’un humour et d’une intelligence remarquables. En prime, les comédiens, excellents, semblent s’amuser en permanence, contribuant ainsi à donner à ce conte filmé son esprit réellement euphorisant.
critique de Laurent AKNIN
Film français d’Ado ARRIETA (2016), avec Niels SCHNEIDER, Agathe BONITZER, Mathieu AMALRIC, Ingrid CAVEN. 1h 22.