Hirokazu KORE-EDA, né à Tokyo il y a cinquante-cinq ans, a réalisé plusieurs films essentiels, Nobody Knows, en 2004, Still Walking, en 2008, I wish en 2011, Notre petite sœur en 2015. Des films complexes et limpides, ce qui est la marque des grands cinéastes. Avec la mise en perspective des différentes générations, de leurs rapports entre elles, il exerce une vision stéréoscopique en nous faisant comprendre tous les points de vue à la fois et en nous donnant l’impression d’être plus intelligents qu’à notre entrée dans la salle. Tragédies glaçantes ou comédies d’une folle gaieté, invention, fantaisie : il n’oublie jamais les conflits, les frustrations, tout est fondé sur l’énergie de ses personnages et de sa propre mise en scène. Depuis Tel père, tel fils en 2013, ses distributeurs français ont abandonné l’idée saugrenue de sortir des films japonais avec des titres anglais : Après la tempête examine à nouveau le tissu des liens familiaux, cette fois avec un adulte indécis, sensible, artiste et frustré au centre de son récit. Interprété par Abe HIROSHI, pour sa quatrième collaboration avec KORE-EDA, Ryota cherche le sens et la confiance, qui lui manquent. Écrivain incertain et détective privé pas très réussi… comme Antoine DOINEL ? Entre l’argent qui manque, une femme qui s’éloigne, une mère qui vieillit, un fils qui va entrer dans l’adolescence, il avance, malgré ses doutes et ses faiblesses. Comme l’éruption volcanique de I wish, le typhon d’Après la tempête est une contrainte supplémentaire imaginée par le cinéaste pour questionner la liberté de ses personnages. Que faire de cette liberté toujours menacée ? KORE-EDA suit les chemins d’Ozu en interrogeant la transmission familiale mais il n’est pas loin de Sartre écrivant : « Être libre, c’est se choisir dans le monde ».
Critique de René MARX
Umi yori mo Mada Fukaku. Film japonais de Hirokazu KORE-EDA (2016), avec Hiroshi ABE, Yoko MAKI, Yoshizawa TAIYO. 1h 58