Le fil rouge de ce portrait de groupe avec drames est un chien de compagnie allongé et bas sur pattes qui passe de laisse en laisse, témoin impuissant des turpitudes décourageantes de ses maîtres, mais aussi victime de leurs caprices et de leur inconséquence. L’occasion pour le réalisateur de Happiness (1998) de croquer quelques personnages comme il les affectionne. Il renoue dans Le Teckel avec ses thèmes de prédilection, ajoutant quelques spécimens croquignolets à son tableau de chasse consacré aux névroses de ses compatriotes. Mais toujours avec cet humour caustique qui le caractérise et que servent merveilleusement ici trois muses du cinéma indépendant new-yorkais : Ellen Burstyn, Julie Delpy et Greta Gerwig. Pas question toutefois pour ce cinéaste narquois et pince-sans-rire de succomber à l’ivresse de l’anthropomorphisme. Son teckel est un témoin silencieux et parfois aussi celui par qui le scandale arrive. Il n’est doué ni de la parole ni de raison pour autant, mais ce dont il est témoin suffit à sa vie de chien docile et observateur. Qu’il serve de doudou consolateur ou se voit rebaptisé Cancer, c’est à ses vertus thérapeutiques qu’en veulent ceux dont il est le fidèle compagnon, mais aussi parfois l’exutoire salvateur. Le Teckel ne fait qu’ajouter quelques sketches particulièrement jubilatoires à une œuvre en perpétuel devenir dont la cohérence ne s’est jamais démentie depuis Bienvenue dans l’âge ingrat, le film qui a révélé son auteur en France il y a une vingtaine d’années.
Jean-Philippe GUERAND
Wiener-Dog. Film américain de Todd SOLONDZ (2016), avec Greta GERWIG, Julie DELPY, Danny de VITO. 1h 28.