Le cas Tim Burton mérite que l’on s’y penche, le cinéaste étant guetté tout à la fois par la consécration due aux grands créateurs (expo à la Cinémathèque) et les questions que pose un certain piétinement artistique. Miss Peregrine et les Enfants particuliers fait le grand écart entre les deux faces de la pièce Burton : l’auteur iconoclaste et le faiseur certifié de blockbusters. Une schizophrénie qui a, ces dernières années, abouti à des œuvres aussi différentes que La Planète des singes et Frankenweenie. Miss Pereregrine vise la synthèse en adaptant un livre pour enfants sur un univers à la fois enfantin et cruel. Une référence claire au mètre étalon commercial qu’est devenu Harry Potter, mais qui permet également au cinéaste de retrouver éventuellement sa spécificité : cette touche de méchanceté bizarre qui fit du cinéaste, à une époque, un authentique réalisateur de conte de fées, au sens le plus véritable et pervers du terme. Miss Peregrine remplit plutôt bien le contrat sous cet aspect. Le récit est mené avec une efficacité de vieux routier hollywoodien, plusieurs scènes portant la trace de cette fascination pour les freaks et la laideur qui ont permis à l’auteur de se distinguer. De la belle ouvrage donc, mais avec le sentiment d’un surplace artistique, celui d’un metteur en scène qui a clairement soldé les comptes avec une partie de sa carrière, sans avoir apparemment trouvé la suite.
Pierre-Simon GUTMAN
Miss Peregrin’s home for peculiar children. Film américain de Tim BURTON (2016), avec Eva GREEN, Asa BUTTERFIELD, Samuel L. JACKSON. 2h 07.