Michael Moore s’est fait une spécialité de sujets polémiques, portant le fer là où ça fait mal, qu’il s’agisse des méfaits du capitalisme financier, de la fascination de certains pour les armes ou du manque de transparence en matière politique. Malgré son titre guerrier, Where to invade next est à ranger à part, le cinéaste parcourant cette fois le monde pour constituer un catalogue de ce qui marche. Avec l’idée, en creux, de montrer aux Américains qu’il existe des pistes pour apporter un mieux-être qui semble trop souvent hors de portée. On pourra sans doute ergoter sur une certaine naïveté dans le traitement de tel ou tel sujet, surtout quand il s’agit de la France et que l’on ne se reconnaît pas vraiment dans les images du documentariste, même si l’écart entre sa vision du monde et la réalité n’est pas aussi béant que dans Sicko, consacré aux systèmes de santé. Bien sûr que Moore est horripilant. Sa façon de se mettre en scène, de se glisser à l’intérieur de chaque plan. Sa propension à stigmatiser les uns, à idéaliser les autres sans chercher à nuancer son propos. Mais ces défauts deviennent des qualités dès lors que son cinéma devient un instrument de combat. Non pas pour une idéologie précise, mais bien au service de l’humanité. Et il nous venge de toutes nos frustrations en nous expliquant, comme le proclamait Ken Loach à Cannes, qu’un autre monde est possible. Le problème est que le cinéma ne peut pas tout, c’est un euphémisme. La Palme d’or remportée par notre homme pour son Fahrenheit 9/11 a eu beau mettre en lumière la pitoyable nullité de George W., ce dernier n’en a pas moins été réélu deux ans plus tard !
Yves ALION
Film documentaire américain de Michael MOORE (2015). 2h.
https://www.youtube.com/watch?v=tFgewMnZdQc