Après six ans d’absence (largement occupées à tenter -en vain- de monter un projet de film se déroulant pendant la Grande Guerre), Olivier MARCHAL revient à ce qui est décidemment son terrain de prédilection, le polar. Ce qui n’est pas plus étonnant que cela, notre homme ayant été flic pendant plusieurs années avant de se tourner vers le cinéma. Carbone est un film de commande, et nous n’en profiterons pas pour faire la liste des chefs d’œuvre qui sont des films de commande. Mais force est de reconnaître qu’il s’agit sans doute du meilleur film de MARCHAL, qui s’est débarrassé de sa tentation pour le baroque pour mieux s’intéresser aux personnages. Comme le titre ne l’indique peut-être pas clairement, le film repose sur l’histoire (vraie) de l’arnaque à la TVA opérée en 2008 par des truands astucieux alors qu’il était possible de revendre des droits à polluer par l’intermédiaire de sociétés écrans. Le mécanisme n’est peut-être pas limpide, mais le fraude a porté au final sur des centaines de millions d’euros… Ce qui fait la force du film, c’est la façon dont il met en lumière la porosité entre les milieux d’affaires et le Milieu (tout court). Le personnage central est d’ailleurs un chef d’entreprise en faillite, acculé à devenir malhonnête pour ne pas tout perdre, qui se met en cheville avec des petits voyous qui ne gardent pas vraiment la tête froide dans l’affaire… Les polars n’ont sans doute plus pignon sur rue comme ils l’avaient il y a encore quelques années, mais il en reste. Et Carbone se range sans forcer parmi ceux qui resteront dans nos mémoires, décrivant le monde de la nuit, celui des petits voyous qui se rêvent en grands caïds, celui des flics marron, etc. Entre tragédie grecque et chronique d’un monde qui ne tourne pas très rond, Carbone est en tous cas une belle réussite.
Critique d’Yves ALION
Film français d’Olivier MARCHAL (2017), avec Benoit MAGIMEL, Laura SMET, Gérard DEPARDIEU. 1h 44.