Carine TARDIEU a décidément un problème avec la filiation. Ses deux premiers films, des courts métrages, avaient en commun de parler du cancer de sa mère. Passant au long, avec La Tête de Maman, elle en remettait une couche sur ce traumatisme que l’on imagine inextinguible. Avant de mettre en scène la mort d’une petite fille dans Du vent dans mes mollets. On ne meurt pas dans ce troisième long métrage, mais c’est la relation entre un homme et son père déjà âgé qui pose problème quand le premier prend conscience… qu’il n’est pas son père. Tout cela pourrait être extrêmement douloureux. Mais Carine TARDIEU a choisi d’en rire. Un rire d’autant plus délicieux qu’il n’est jamais forcé, y compris quand la mort s’invite à la noce. C’est tout son talent que de savoir ménager des moments de belle émotion, mais sans jamais donner le sentiment de se prendre au sérieux. Pour ce faire il faut dire que le choix de François DAMIENS est des plus judicieux, le comédien étant particulièrement à l’aise pour exprimer des changements d’humeur ou de registre, glissant du burlesque au tragique en un tournemain. On pourra toujours ergoter que les rebondissements se font un peu nombreux dans la seconde partie du film et que les personnages perdent sans doute un peu de leur incarnation devant cette avalanche de retournements. Mais Carine TARDIEU le fait avec une telle maestria que nous ne lui en tenons pas rigueur, d’autant que les comédiens nous ont mis dans leur poche depuis belle lurette…
Critique d’Yves ALION
Film français de Carine TARDIEU (2017), avec François DAMIENS, Cécile DE FRANCE, André WILMS, Guy MARCHAND. 1h 40.