C’est incontestablement sur les terres d’HITCHCOCK que François OZON a semé les graines de cet Amant double tant il se régale à multiplier les figures habituelles du thriller psychologique, à décrire ces « paysages mentaux » dont parlait POLANSKI concernant son héroïne de Répulsion. Soit une jeune femme un peu perturbée qui fréquente deux psychiatres en parallèle, alors que ceux-ci sont jumeaux. On pense évidemment au trouble hitchcockien distillé dans Sueurs froides, et plus généralement à tous ces films qui flirtent avec la folie, d’autant plus séduisante qu’elle est peut-être meurtrière. Tel quel L’Amant double est un très bel exercice de style, OZON ayant depuis longtemps assimilé les mille et une façons de faire sursauter le spectateur, après l’avoir plus ou moins subtilement provoqué. Comme souvent chez le signataire de Swimming Pool, le malaise est intimement lié à la sexualité de ses personnages, refuge brûlant de tous les non-dits. Il ressort d’ailleurs assez vite que derrière les ors du film de genre chic et choc, OZON livre un nouvel aperçu de ses habituelles obsessions : la haine de la famille, le flou des identités, notamment sexuelles, la part d’ombre que chacun recèle, etc. Dans le rôle des jumeaux (mais est-on certain qu’il ne s’agit pas du même homme, en pleine crise de schizophrénie ?), Jérémie RENIER est en tous cas impérial, prouvant une nouvelle fois qu’il est l’un des grands comédiens de ce temps.
Critique d’Yves ALION
Film français de François OZON (2017), avec Marine VATCH, Jérémie RENIER, Jacqueline BISSET. 1h 47.
https://www.youtube.com/watch?v=SUuDns5gn50