Est-il encore utile de raconter l’intrigue du classique d’Agatha CHRISTIE ? Sidney LUMET réalisa en 1974 une adaptation prestigieuse de ce roman policier archétypal dans lequel un meurtre mystérieux est commis à bord du convoi mythique dont le coupable ne peut être que l’un des passagers. Passée une séquence d’ouverture d’une virtuosité assumée, l’intrigue respecte la règle des trois unités, sous le regard d’un empêcheur de tuer en rond en la personne du fameux détective belge Hercule POIROT. Des deux côtés de la caméra, Kenneth BRANAGH se régale autant en fin limier aux bacchantes en bataille et à l’accent prononcé qu’en grand ordonnateur d’une mise en scène spectaculaire qui tire profit de toutes les contraintes et multiplie les effets de style avec une jubilation communicative. La distribution, prestigieuse à souhait, offre au spectateur le plaisir suranné de reconnaître les visages familiers de ces acteurs de composition invités à forcer la note dans un esprit qui évoque une partie de Cluedo. Ce pur plaisir repose sur une conception ancienne du cinéma, mais aussi sur la spécificité narrative de ces romans choraux dans lesquels Agatha CHRISTIE déclina méthodiquement les moindres hypothèses qu’impliquait un assassinat, du Meurtre de Roger Ackroyd (1927) à Dix petits nègres (1939), en passant évidemment par Mort sur le Nil (1937) qui constitue le pendant du Crime de l’Orient Express (1934) et devrait logiquement succéder à ce premier opus d’un nouveau cycle cinématographique.
Critique de Jean-Philippe GUERAND
Murder on the Orient Express. Film américain de Kenneth BRANAGH (2017), avec Kenneth BRANAGH, Penélope CRUZ, Judi DENCH. 1h49.