L’Allemagne dévastée a servi de cadre à bon nombre de films tournés en décors naturels dans l’immédiat après-guerre, d’Allemagne année zéro (1948) de Roberto ROSSELLINI à La Scandaleuse de Berlin de Billy WILDER et Berlin Express de Jacques TOURNEUR. Récemment, encore, Christian PETZOLD en faisait le cadre de son mélodrame flamboyant Phoenix (2014).
Cœurs ennemis met aujourd’hui les ressources les plus sophistiquées du numérique au service d’une reconstitution spectaculaire du Hambourg en ruines de 1946. Un colonel de l’armée d’occupation britannique chargé de superviser les travaux de reconstruction se trouve logé avec son épouse dans la propriété d’un veuf qui continue à vivre sous les combles avec sa fille rebelle. Le cinéma a trouvé dans le roman de Rhidian BROOK Dans la maison de l’autre matière à brasser les thématiques de Brève rencontre (1945), de Quelque part en Europe (1948) et du Silence de la mer (1949).
Résultat : un film au souffle romanesque assumé dont tous les protagonistes assument leur statut d’archétypes. Ceux qui s’obstinent à considérer Keira KNIGHTLEY comme une (très) jolie fille sans reconnaître son talent d’interprète devraient réviser leur jugement. Quatre mois après sa composition impeccable dans Colette, cette actrice subtile démontre avec Cœurs ennemis qu’elle est la digne héritière de ces stars qui enchaînaient les rôles sans courir après les performances et les prix d’interprétation, en privilégiant systématiquement leurs personnages à leur ego.
Critique de Jean-Philippe GUERAND
The Aftermath. Film britannique de James KENT (2018), avec Keira KNIGHTLEY, Jason Clarke, Alexander SKARSGÅRD. 1h48.